Elle est, selon les commissaires de l’exposition "la moins connue des plus grands peintres du XVIIème siècle européen". Née en 1593, Artemisia Gentileschi est la fille d’Orazio Gentileschi, lui-même grand peintre baroque à Rome. Initiée à la peinture par son père, Artemisia a ensuite suivi son propre chemin au fil d’une carrière de premier plan, qui la mena de Rome à Florence, puis de Rome à Naples, avec un passage par l’Angleterre.
Pourquoi est-elle encore si peu connue aujourd’hui ? Sans doute parce qu’étant une femme, l’éclairage de son œuvre s’est au fil des siècles avéré moins favorable que celui apporté aux peintres hommes. Mais surtout, parce qu’au XXème siècle, son travail a été essentiellement abordé sous un aspect psychologisant, avec une lecture de ses tableaux avant tout biographique, ramenant leurs thématiques au traumatisme qu’elle a subi à l’âge de 17 ans, violée par un peintre collègue de son peintre, événement suivi d’un retentissant procès.
Or, s’il est vrai que les représentations violentes issues de la mythologie sont bien présentes dans son œuvre, comme le Suicide de Lucrèce, Artemisia Gentileschi ne s’est pas, loin de là, enfermée dans cette voie. Et si elle a peint beaucoup de femmes, à travers des portraits, des peintures religieuses ou d’histoire, ces thèmes ne sont que le reflet des goûts de l’époque.
La rétrospective du Musée Maillol, une première dans notre pays, permet enfin au public français de découvrir l’œuvre d’Artemisia Gentileschi.
A rebours chronologique, l’exposition débute avec par la période napolitaine, où l’artiste, entre 1630 et 1654, à l’apogée de son art, connaît son plus grand succès international.
C’est ici que l’on admire quelques uns de ses plus beaux tableaux. Si l’on tombe en premier regard sur un impressionnant Suzanne et les vieillards, la visite démarre à proprement parler avec une très belle suite de femmes : un autoportrait, deux Madeleine, une Cléopâtre. La maîtrise de la lumière et des expressions apparaissent d’emblée dans ces portraits cadrés en très gros plans. L’on retrouve ce talent pour montrer la nuance d’expressions dans un grand Nymphe Corisca et le Satyre, où la nymphe, non dénuée d’ambiguïté, a un air légèrement moqueur. Quant à L’Allégorie de la peinture, on se demande si son auteur la prend véritablement au sérieux…
Les autres sections montrent les différentes phases de son œuvres, avec notamment de délicieuses Vierge à l’enfant, dont deux placées côte à côte permettent de relever l’évolution de l’artiste entre 1608-09 et 1616-18 : entre ces deux périodes, Artemisia s’est détachée du style de son père marqué par des couleurs claires, pour accentuer les contrastes clairs-obscurs et celui des couleurs, et donner davantage de présence à des personnages.
Cette heureuse manière se retrouve dans deux merveilleuses huiles sur cuivre de dimensions modestes, mais si délicates et lumineuses : une Danaé recevant la pluie d’or et une Vierge au rosaire de 1651. Cette dernière est installée dans une petite salle à part, à côté d’un David méditant devant la tête de Goliath, œuvre de son père Orazio Gentileschi, découverte quelques semaines seulement avant l’ouverture de l’exposition et brillant exemple de peinture sur pierre, avec un précieux lapis-lazuli afghan d’un bleu inoubliable.
Artemisia
Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre
Musée Maillol
61, rue de Grenelle 75007 PARIS
TLJ même les jours fériés, de 10h30 à 19h
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h30
Entrée plein tarif 11 €
Jusqu’au 15 juillet 2012
A voir aussi en ce moment au 2ème étage du Musée Maillol : des tableaux de la désormais célèbre Séraphine, si colorés, lumineux et pleins de vie !
Images :
Artemisia Gentileschi, Danaé, c. 1612, huile sur cuivre, 41,3 x 52,7 cm © Saint Louis, The Saint Louis Art Museum
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