Silbermann. Jacques de Lacretelle

maglm.fr, votre blog culturel préféré, entame une nouvelle année avec vous et, avec Andreossi, vous livre un nouveau billet du feuilleton sur les prix Femina !

Très belle et heureuse année 2025 et très belles lectures à toutes et à tous !

Mag

C’est par ce roman qui a pour thème l’antisémitisme que Jacques de Lacretelle a obtenu le prix Fémina en 1922. Il situe l’action aux alentours de l’année 1905, moment du vote de la loi sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat, mais aussi, sans que l’auteur y fasse véritablement allusion, lorsque l’affaire Dreyfus voit son dénouement en 1906, avec l’innocence enfin reconnue du capitaine.

Curieusement, sans doute parce qu’à l’époque de la sortie du roman ces événements étaient dans tous les esprits, l’auteur ne contextualise pas les mésaventures du jeune Silberman victime du racisme de ses condisciples. Nous restons dans le cadre de relations entre lycéens de familles bourgeoises dont l’un, à l’intelligence brillante, est harcelé à cause de son appartenance religieuse.  C’est le point de vue du narrateur que nous suivons : élève dans un lycée parisien, lui-même de confession protestante, il découvre la haine d’autres lycéens envers le Juif Silbermann.  Il tente d’abord de le défendre, mais finalement s’avouera vaincu par la puissance des normes bourgeoises.

Car ce que veut nous montrer en particulier Jacques de Lacretelle c’est que l’antisémitisme peut aller de pair avec  les intérêts de classe. Le père du narrateur est juge, et son épouse, parfaitement à sa place, soigne la promotion de son mari. Le poste de Conseiller à la Cour passera-t-il par l’inculpation (terme d’époque) du père de Silbermann, peut-être compromis dans une affaire de malversation, ou par l’abandon des poursuites si on le conseille en haut lieu ?

Le désarroi du narrateur face aux exactions que subit David Silbermann, son opposition première aux valeurs familiales sont bien rendus par l’auteur, qui lance aussi quelques piques aux catholiques harceleurs, tel son ex- ami Robin : « il se comportait avec franchise et insouciance, comme s’il avait la garantie commode que toute faute peut-être remise ». Mais les bons sentiments, au-delà de sa lâcheté reconnue à la fin du roman, sont entachés par des stéréotypes physiques (« une chair jaunâtre, une barbe inculte, un gros nez, de grosses lèvres » caractérisent le père Silbermann) ou idéologiques (« le peuple d’élection, ce n’est pas une divagation de prophète mais une vérité ethnologique qu’il vous faut accepter » fait dire le narrateur au jeune David).

On ne peut s’empêcher de penser que cet ouvrage des années 20 du XXème siècle annonce les ravages de l’antisémitisme des décennies suivantes.

Andreossi

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