Pierre Paulin. Le design au pouvoir

Pierre Paulin, le design au pouvoirLa Galerie des Gobelins rend hommage à l’un des plus grands designers français, Pierre Paulin, dont les réalisations sont certainement plus célèbres que son nom lui-même.
Au fil de 40 ans de collaboration avec le Mobilier national, il a mis son talent au service du pouvoir, mais également au service de tous avec des éditions largement connues du grand public.

Dès les années 1950, séduit par le mobilier scandinave, Paulin créé des sièges, des tables et des bureaux en bois blond, aux lignes simples et légères. L’empreinte de ces créations dans nos décors d’aujourd’hui saute aux yeux : ce style n’en finit pas de séduire les citadins en recherche de meubles clairs et peu encombrants.

Impression de les avoir vus mille fois aussi, et pour cause : les sièges créés pour les locaux des administrations, aux formes non seulement fonctionnelles mais aussi d’une rondeur très accueillante. En regard de ceux-ci, Pierre Paulin a choisi de montrer le mobilier de campagne de Napoléon 1er. "Pourquoi en France n’a-t-on jamais été capable de faire du moderne autrement que pour la guerre ?" s’interroge-t-il. Pliables, modulables, d’une élégance sobre, le tout emballé dans de la toile de jute… Il est vrai que ces pièces sont d’une surprenante modernité.

Designer du pouvoir, Paulin a également oeuvré à deux reprises pour la Présidence de la République. La première fois, ce fut pour Pompidou, en demande d’un décor moderne. Paulin aménagea plusieurs pièces à l’Elysée, dont un salon et une salle à manger. Afin de respecter l’enveloppe architecturale, il "re-chemisa" les espaces de grège clair et y installa un mobilier magnifique de sobriété. Teintes lumineuses beige et marron glacé, textiles chaleureux, lignes en rond ou en demi-lune… de façon un peu étonnante, ce mobilier n’évoque que douceur !
François Mitterrand passa également commande, pour un style radicalement différent, très années 1980 ; cette fois pour un mobilier de bureau : lignes franches et anguleuses, le bleu s’étale largement, coupé de fines lignes rouges…

Cette très belle exposition est ponctuée de choix de Paulin parmi les collections du Mobilier national. L’on voit ainsi par exemple un tableau de Pierre Soulages, ou encore, afin de souligner l’inspiration orientale du designer pour ses créations de sièges collectifs comme ceux de la Grande galerie du Louvre, des tapis persans du XVIème siècle, fortement évocateurs de cette idée de "s’assoir ensemble"…

Pierre Paulin, le design au pouvoir
Mobilier national – Galerie des Gobelins
42, av. des Gobelins – Paris XIIIème
Jusqu’au 20 juillet 2008
Tlj sauf le lundi de 12 h 30 à 18 h 30
Entrée : 6 € (TR 4 €)
Visite avec conférencier les mer., ven. et sam. à 15 h 30 et 17 h
Tarif 10 € (TR 7,50 €)

Image : Fumoir du Palais de l’Elysée © Collection Mobilier national, photo Olivier Amsellem

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Pierre Paulin, le design au pouvoir

Pierre Paulin, le design au pouvoirLa Galerie des Gobelins célèbre cette année quarante ans de collaboration avec le designer Pierre Paulin à travers une passionnante rétrospective : lire ou relire le billet du 5 février 2008.

Dans ce cadre, demain mercredi 28 mai de 14h à 16 h 30, l’artiste accueillera le public à la Galerie. Il dédicacera à cette occasion les deux livres Pierre Paulin, le design au pouvoir (éditions RMN) et Pierre Paulin designer (éditions Archibooks).

Pierre Paulin, le design au pouvoir
Mobilier national – Galerie des Gobelins
42, av. des Gobelins – Paris XIIIème
Jusqu’au 20 juillet 2008
Tlj sauf le lundi de 12 h 30 à 18 h 30
Entrée : 6 € (TR 4 €)
Visite avec conférencier les mer., ven. et sam. à 15 h 30 et 17 h
Tarif 10 € (TR 7,50 €)

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La Dame à la Licorne. Musée National du Moyen-Age

Chassons toute idée de l’oeuvre a priori, telle qu’elle peut résulter des pauvres reproductions plaquées ici ou là sur des tasses, des répertoires ou des serviettes en papier.
Ces choses-là n’ont évidemment rien à voir avec le chef-d’oeuvre du XVème siècle qu’est la La Dame à la Licorne, tenture composée de six tableaux, que l’on peut aller voir en vrai (et librement comme on sait) au Musée National du Moyen-Age à Paris.

Une salle lui est réservée, plongée dans la semi-obscurité comme il se doit (eu égard à la dimension onirique de l’oeuvre – en réalité pour des raisons de conservation bien sûr) mais éclairant notre Dame de façon satisfaisante.
Car cette tapisserie a tout pour susciter le rêve : son décor merveilleux fait d’une île bleue, d’un ciel rouge constellé de fleurs, de petits arbres mythiques (orangers, chênes, houx…). Mais aussi ses "personnages", animaux aux douces fourrures, familiers comme le lapin et le renard, ou sauvages comme le lion, la panthère et le guépard, mais au regard bienveillant. Et surtout, une licorne magnifique à l’air "intelligent" et attentif, mais non dénué d’ambigüité.

Au centre de chacun des six tableaux, une dame aux toilettes toutes différentes mais aussi élégantes et riches les unes que les autres, brocart, moire ou soie sans parler des bijoux… Elle évoque avec l’aide de ses compagnons, lion, singe et licorne chacun des cinq sens : le goût ; l’ouïe ; la vue ; l’odorat ; le toucher. La sixième tenture porte le beau nom de A mon seul désir. Elle est la plus mystérieuse et a donné lieu à de nombreuses interprétations.

Verticalité ; simplicité et splendeur des couleurs ; grâce des expressions ; innocence mêlée à un symbolisme très fort (1), ces scènes éblouissent et fascinent. On pourrait rester des heures à les contempler, comme pris au piège de ce monde fantasmatique et poétique imaginé il y a plus de cinq siècles par un dessinateur resté anonyme.

La Dame à la Licorne.
Musée National du Moyen-Age
Thermes et hôtel de Cluny
6, place Paul Painlevé – Paris 5ème
M° Cluny-La Sorbonne / Saint-Michel / Odéon
Bus n° 21 – 27 – 38 – 63 – 85 – 86 – 87
RER C Saint-Michel / l B Cluny – La Sorbonne
TLJ sf le mardi, de 9 h 15 à 17 h 45
Entrée libre jusqu’au 30 juin 2008

(1) Animal mythique, la licorne a un corps de chèvre et une tête de cheval surmontée d’une corne en forme de dent de narval. Douée d’une rapidité et d’une force prodigieuses, elle ne pouvait être capturée que grâce à une jeune fille. Fréquemment représentée dans l’iconographie médiévale, elle est à la fois un symbole religieux – une figure du Christ – mais aussi un symbole profane – celui de l’amant.

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Biedermeier, de l’artisanat au design. Musée du Louvre

Biedermeier, exposition au LouvreAprès les excès du rococo, les arts décoratifs marquent à la fin du XVIIIème siècle et au début du XIXème siècle un retour aux sources classiques grecques et romaines, inspirations majestueuses qui siéront à l’Empire avec ses marbres, ses bronzes dorées, ses soieries et ses damas de velours.
Alors que le style Empire français se répand en Europe, se développe à partir de 1815 en Autriche, dans cette mouvance néo-classique, un style original que l’on appellera rétrospectivement Biedermeier.
Il ne tardera pas à gagner les autres régions de l’Europe orientale et de l’Allemagne, où il perdurera jusqu’à 1850 environ.
Le nom de Biedermeier est celui d’un personnage de fiction créé tardivement pour un hebdomadaire satirique munichois pour parodier le mode de vie de la société bourgeoise d’Europe centrale. Si effectivement ce type de mobilier robuste et confortable évoque avant tout les milieux bourgeois conservateurs du début du XIXème siècle, l’on apprend en parcourant l’exposition que les idées esthétiques à l’origine de ce mouvement furent d’abord promues par la famille impériale autrichienne et par l’aristocratie. Celles-ci, après les guerres napoléoniennes, rejettent le grandiose et l’ostentatoire (qui avait cours en France) et mettent en avant un mode de vie replié sur les valeurs morales et la sphère familiale.
Et, contrairement à ce que ses lignes simples et sa faible ornementation laissent présumer, le mobilier et les arts décoratifs Biedermeier sont au départ des œuvres artisanales. Ce ne sera qu’à partir des années 1830-1840 que l’Empire Austro-Hongrois adoptera les modes de fabrication industriels développés plus précocement en Angleterre et que le style se diffusera alors dans les intérieurs bourgeois.
L’exposition vaut le détour tant il est vrai que le Biedermeier est un style singulier, une sorte de synthèse lointaine du Regency anglais et de l’Empire français, mais qui, surtout, annonce le design moderne adapté à la production de masse.
Cela est frappant avec les arts de la table : dès le début du XIXème siècle, les modèles d’orfèvrerie sont extrêmement dépouillés si bien que les plats et les théières paraissent étonnamment "d’aujourd’hui".
Les meubles sont certes imposants, parfois même un peu "mastoc", mais leur grandes lignes géométriques arrondies, leur sobriété évoquent un sens pratique, voire un souci d’ergonomie novateur et séduisant. Les bureaux révèlent des rangements astucieux, les tables deviennent multi-usages, les chaises s’équipent de dossiers en éventail, bas et courbés. L’austérité des formes était par ailleurs largement réchauffée et égayée par le choix des couleurs de garniture et de papier peint, avec des jaunes, des bleus et des verts très vifs.
La simplicité et l’épure, le pragmatisme voire l’audace confèrent au Biedermeier, deux siècles après son émergence, un aspect moderne tout à fait surprenant.

Biedermeier, de l’artisanat au design
Musée du Louvre
Aile Sully, 1er étage, salle de la Chapelle
Jusqu’au 14 janvier 2008
TLJ sauf le mar., de 10 h à 18 h, nocturne (22 h) mer. et vend.
Entrée 9 €, 6 € après 18 h mer. et vend. (billet collections permanentes)
Catalogue, en partenariat avec le musée de Milwaukee, le musée historique de Berlin et l’Albertina de Vienne (Coédition Musée du Louvre Éditions /Officina Libraria /Éditions Nicolas Chaudun), 240 p., 35 euros.

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Design contre design, deux siècles de création

design contre design au Grand PalaisDès l’entrée, on sent qu’on va avoir le champ libre.
Foin de chronologie ; table rase sur l’histoire des styles.
Les textes à la graphie poétique se limitent à quelques synthèses libres et inspirées (et facultatives).
La scénographie se remarque à peine tant elle est réussie.
Avec cette exposition de meubles et objets décoratifs du début du XIXème siècle (et parfois même bien plus anciens) à aujourd’hui, montrés avec simplicité, les Galeries du Grand Palais semblent s’affranchir de leur cadre habituel.

Cela n’a l’air de rien, mais cette exposition est la légèreté même.
La simplicité n’est qu’apparente. Les oeuvres, le plus souvent remarquables de beauté et de créativité, sont soigneusement choisies et exposées. Les rapprochements tombent sous l’évidence.
L’heureux emmêlement des époques donne à l’exposition une consistance exceptionnelle.

On débouche donc sans préambule dans une vaste galerie consacrée aux formes.
A gauche, tout n’est que cercles, sinuosités et volutes : des merveilles qui vont de la chaise au dossier en coeur (noyer), en provenance du Vienne des années 1820, à Bubbles, chaise longue en carton ondulé de Frank Owen Ghehry (1987). A droite, c’est tout carré, parfois même Art nouveau, mais ça finit de guingois…

Au rez-de-chaussé, le public s’échauffe. Avec les motifs tirés de la faune et de la flore, on est ici dans le figuratif, voire dans l’affectif.
Hanap à l’escargot, coquille de nacre, tête en argent doré et pied sculpté semble tout droit sorti d’un cabinet de curiosités du XVIIème siècle. Mais de belles chichiteries Art nouveau ne sont pas en reste, telle cette lampe qui tombe de la gueule un peu effrayante d’un animal au corps reptilien fin et courbé.
Le plus excitant est au fond, lorsqu’on touche au corps humain : sofas en forme de bouche, de main, de pied, de courbes féminines… sans échapper à The Womb House (Atelier Van Lieshout, 2004), alcôve rouge équipée de kitchnette, douche, WC, en forme… d’utérus !
Auparavant, on aura eu l’occasion de relever une fois de plus que l’audace ne date pas du XXème siècle, avec ce bol en forme de sein de Marie-Antoinette (1788)…

En fin de parcours, on est invité, après avoir ôté ses chaussures, à pénétrer dans l’installation Phantasy landscape (1970).
Faites ce qu’on vous dit et entrez : choisissez votre position, par exemple, buste incliné et jambes surélevées. Au dessus de vôtre tête, bleu, violet, rose, rouge, orange et jaune s’harmonisent en un large arc-en-ciel lumineux.
La chaleur, la mousse, les formes arrondies, la musique sucrée dans la demi-obscurité détendront et feront taire aussi vos voisins (cinq au maximum). Fatigué mais léger, vous laissez couler le temps un moment… avant de ressortir en flottant.

Design contre design, deux siècles de création
Galeries nationales du Grand Palais
Jusqu’au 7 janvier 2008
Tlj sauf le mardi de 10 h à 20 h, jusqu’à 22 h mercredi et vendredi
M° Franklin-Roosvelt et Champs-Elysées-Clémenceau
Entrée 10 € (TR : 8 €)
Catalogue : 374 p., 59 €

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Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés, quatre siècles de création

galerie des Gobelins, Mobilier nationalLe mot "tapisseries" évoque aujourd’hui pour beaucoup des vieilleries aux couleurs fanées et aux motifs historiques un peu assommants.

C’est ignorer que les manufactures des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie continuent de produire chaque année, comme il y a quatre cents ans, des oeuvres d’art tissées d’après les modèles originaux d’artistes contemporains.

Telle est la découverte que nous offre l’exposition Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés, quatre siècles de création présentée à la Galerie des Gobelins jusqu’au 25 novembre prochain.

Le rez-de-chaussée réserve ainsi un déploiement spectaculaire de couleurs intenses, chatoyantes, où l’on peut admirer des tapisseries signées Alechinsky, Philippe Favier (magistral hommage à Miro) ou encore le tapis de Matali Crasset (Hommage à l’utopie de Ledoux, 2006).

Au pied de ces véritables tableaux, sont harmonieusement exposés des meubles issus de l’Atelier de recherche et de création du Mobilier national, dans d’heureux mariages de lignes et de tonalités.

Le 1er étage, réservé au passé, crée l’événement avec la Tenture Royale d’Artémise. Cet ensemble de quinze tapisseries tissées au fil d’or et d’argent d’après des dessins d’Antoine Caron avait été commandé par Henri IV pour être offert à Catherine de Médicis. Scindé dès le XVIIème siècle, il est présenté pour la première fois au public dans son intégralité.

A découvrir enfin, un échantillon du mobilier créé au fil des siècle pour orner les lieux du pouvoir. Ors, magnificence, splendeur : rien ne semble trop beau pour le décor des palais de l’Etat.
Si l’on contourne certaines pièces témoins de la folie des grandeurs de nos gouvernants – tel cet immense bénitier en cristal, cadeau à l’impératrice Eugénie – ce sera pour mieux d’approcher de splendides oeuvres du XVIIIème siècle : un adorable bonheur du jour en acajou, bronze et marbre, ou encore un cartonnier orné d’une pendule, avec marqueterie en bronze et écaille de tortue, signé André-Charles Boulle.

Un petit film (15 mn) met joliment en perspective l’héritage du passé et le savoir-faire des ateliers, en montrant le travail et les techniques des artisans qui, aujourd’hui encore, fabriquent et restaurent tapis, tapisseries et mobilier. Entre art et histoire, il met en valeur un délicat travail d’observation et de minutie passionné et passionnant.

Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés
Galerie des Gobelins
42, avenue des Gobelins – Paris 13ème
Jusqu’au 21 novembre 2007
Tlj sauf le lundi de 12 h 30 à 18 h 30
M° Gobelins, bus 27, 47, 83 et 91

On peut aussi visiter les ateliers des manufactures toute l’année, les mardi, mercredi et jeudi de 14 h à 16 h 30 (10 €, TR : 7,50 €)

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La Galerie des Gobelins

galerie des Gobelins, restaurationLa manufacture des Gobelins a été créée sous le règne d’Henri IV en 1601.

Mais c’est avec Louis XIV qu’elle prit toute son ampleur, devenant Manufacture Royale à l’initiative de Colbert.
Sous l’autorité de Charles Le Brun, elle produisit des tapisseries de haute qualité destinées à l’ameublement des Maisons royales et aux présents diplomatiques, établissant ainsi sa réputation bien au delà des frontières de la Couronne.

Par la suite, son activité déclina, notamment en raison des difficultés financières de l’Etat. Elle retrouva quelque vigueur sous l’impulsion de Napoléon, qui voulait que ses productions soient "le principal ornement des maisons impériales".

Incendiée par les Fédérés en 1871, la manufacture nationale des Gobelins fut reconstruite au début du XXème siècle selon les plans de Jean-Camille Formigé, Grand prix de Rome et architecte du métro aérien.

Rattachée à l’administration du Mobilier national depuis 1937, sa galerie a été fermée en 1972 pour des raisons de place.

Après d’importants travaux de rénovation, elle a rouvert en mai dernier, quelques quatre cents ans après sa création, afin de présenter au public tapisseries, tapis, meubles et objets d’arts issus des ateliers du Mobilier national et des trois manufactures nationales (Gobelins, Beauvais et la Savonnerie).

Son exposition inaugurale Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés, quatre siècles de création, prolongée jusqu’au 25 novembre prochain, met formidablement en avant ce bel ancrage dans l’histoire du patrimonial national.

Mais elle est également, pour le non-initié, une révélation : celle des créations issues chaque année de ses ateliers, des merveilles qui « tombent du métier », pour reprendre l’expression consacrée par la profession.

C’est notamment ce que l’on verra demain, avec la visite de l’exposition…
A très bientôt.

Galerie des Gobelins
42, avenue des Gobelins – Paris 13ème
Exposition Les Gobelins 1607-2007, Trésors dévoilés jusqu’au 21 novembre 2007
Tlj sauf le lundi de 12 h 30 à 18 h 30
M° Gobelins, bus 27, 47, 83 et 91

On peut aussi visiter les ateliers des manufactures toute l’année, les mardi, mercredi et jeudi de 14 h à 16 h 30 (10 €, TR : 7,50 €)

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L'aventure de la porcelaine au musée d'Orbigny-Bernon à La Rochelle

musée d'Orbigny-Bernon, ChineLa maîtrise de la fabrique de la porcelaine fut une histoire longue et compliquée en Europe.

Arrivées par le Moyen-Orient à la fin du Moyen-Age, les porcelaines chinoises suscitèrent immédiatement un grand intérêt en Europe.
On attacha à ce matériau à la fois dur, translucide et éclatant toutes sortes de vertus, dont celle de détecter les poisons…

Les Européens s’efforcèrent dès lors de reproduire cette matière exceptionnelle.
Cependant, ils ignoraient la composition de la pâte, ce qui constitua un obstacle permanent.
Ils réalisèrent d’abord les majoliques, puis la faïence, mais le support demeurait une terre cuite sans rapport avec la texture cristallisée dans la masse de la porcelaine chinoise.

Le XVIème siècle connut de nouvelles tentatives plus abouties avec la porcelaine dite des Médicis à Florence et son adaptation française de Saint-Porchaire.
C’est surtout à la fin du XVIIème siècle et au cours du XVIIIème siècle, avec la mise au point de la porcelaine tendre à fritte, ou porcelaine artificielle que les manufactures françaises (Vincennes-Sèvres, Chantilly, Mennecy…) et anglaise, associant les recherches des céramistes et verriers, imitèrent le mieux la porcelaine dure, sans parvenir néanmoins à obtenir véritablement le résultat recherché.

Les Allemands furent les premiers à identifier en Saxe, en 1709, le kaolin qui permettait de fabriquer la véritable porcelaine.
Auguste le Fort créa donc en 1710 la manufacture de Meissen et essaya de conserver secrète la fameuse formule de l’« arcane », que toute l’Europe lui enviait.
Mais la diffusion était irrésistible et la porcelaine dure finit par faire son apparition à Vienne en 1717, puis, vers le milieu du siècle, à Höchst, Wymphenberg, Berlin…
Le secret passa aussi à Strasbourg, mais les Français découvrirent à leur tour, en 1763, le kaolin à Saint-Irieix près de Limoges et nombre de manufactures françaises fabriquèrent simultanément des pièces en porcelaine dure et d’autres en porcelaine tendre, ces dernières tendant à disparaître à la veille de la Révolution.

La porcelaine dure avait alors conquis l’Europe entière : l’Italie avec Capodimonte, la Russie avec Saint-Pétersbourg, l’Angleterre, les Pays-Bas, la Suisse, l’Espagne, au point d’être répandue partout au XIXème siècle.

Les décors ne devront dès lors plus grand-chose à l’Extrême-Orient et, après le passage obligé du néo-classicisme international, les tendances les plus diverses se donneront libre cours.

Rappelant ainsi l’histoire de la porcelaine en Occident, le musée d’Orbigny-Bernon à La Rochelle présente une série porcelaines chinoises des XVIIIème et XIXème siècles, mais également un grand nombre d’objets décoratifs issus des manufactures européennes aux mêmes époques, permettant de mesurer, effectivement, la variété des inspirations.
Ainsi, dans les vitrines consacrées à la porcelaine de Meissen (Saxe) du XVIIIème siècle, on appréciera les efforts d’imagination des maîtres de l’époque : par exemple, avec la série de figurines intitulées L’Amérique, L’Afrique et L’Asie.
L’Afrique attire immanquablement l’attention, donnant à voir un nègre noir comme l’ébène, assis sur un lion, richement vêtu : peau ornée de plumes multicolores, drapé d’une cape lie-de-vin doublée de vert franc et fermée par un soleil, la tête coiffée d’un trophée de chasse–tête d’éléphant… un modèle qui vaut le détour !

Noter que le musée propose également un éclairage historique de la ville (notamment sur les célèbres sièges de la Rochelle ainsi que la Seconde Guerre mondiale).
D’autres salles sont consacrées aux arts d’Extrême-Orient (où on peut admirer une chambre chinoise du XIXème siècle), enrichis de dépôts du Musée Guimet (sur ce célèbre musée parisien, lire les billets du 27 et du 29 août dernier).

Pour tous les amateurs de porcelaines et autres chinoiseries, ne pas oublier le musée des Arts décoratifs à Paris. Consulter aussi quelques ouvrages consacrés à la matière.

Musée d’Orbigny-Bernon
2, rue Saint-Côme – 17000 La Rochelle
Tél. : 05 46 41 18 83
Fax : 05 46 29 22 60
Mél: musee-art@ville-larochelle.fr
Entrée : 3,50 €

Image : Bouteille, porcelaine "bleu et blanc", Chine, dynastie Ming, période de transition (1630-1640)

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René Lalique, Créateur d'exception 1890-1910.

lalique epingleDes moineaux à la gorge gonflée délicatement posés sur une branche, couverts de brillants : voici l’une des premières créations de René Lalique, lorsqu’il travaillait dans l’anonymat pour les grands joaillers Boucheron et Vever.

Déjà éclatent la finesse et le travail profondément créatif de l’artiste.

Né en Champagne en 1860, Lalique puise dans son enfance champêtre une constante inspiration.
Motifs végétaux, floraux et animaux les plus ordinaires demeureront présents tout au long de sa prolifique carrière, conférant à son œuvre une simplicité que ses autres inspirations – bien de son temps – n’altèreront pas.

Lorsqu’il fonde son propre atelier en 1887, il abandonne la joaillerie et a l’audace d’utiliser des matériaux moins nobles, comme l’ivoire et la corne, des pierre fines aux couleurs étranges comme l’onyx, le jaspe, l’agate, l’opale, qui lui permettent d’explorer sans limite le champ des couleurs et des formes, à la mesure de son génie créatif et de son imagination débordante.
Sensible aux inspirations de l’époque, son œuvre permet de retrouver les grandes tendances des arts décoratifs de la fin du XIX° et du tout début du XX°.

De l’éclectisme fin de siècle, avec la veine égyptienne qui persiste depuis les conquêtes napoléoniennes, à l’Art Déco du XX°, René Lalique se délectera un long moment dans le mouvement de l’Art Nouveau avec sa faune, sa flore, ses volutes, mais aussi un symbolisme très marqué avec le cygne, le serpent …
Des estampes japonaises qui circulent alors à Paris, il utilise les motifs de pivoines, chrysanthèmes, branches de prunier, pavots, ombelles, qu’il incruste dans des peignes de bois laqués.

De tous ces mouvements, il fait un miel qui lui est propre, reconnaissable entre tous (un coup d’œil sur les créations d’autres concepteurs contemporains permet de le vérifier) : délicatesse, grâce, originalité, mais aussi une délicieuse ambiguïté dans sa représentation – constante – de la femme.
Au lissé des visages à l’ovale parfait, à la nudité innocente des corps féminins, se mêle le doux effroi des animaux qui font frissonner, insectes, iguanes, crapauds, chauves-souris …

Au delà de la beauté pure de ses bijoux d’exception, René Lalique ouvre ainsi au visiteur attentif tout un monde de poésie, de fantasmes et de fantaisie, qui fait de cette exposition un véritable enchantement.

René Lalique, Créateur d’exception 1890-1910
Musée du Luxembourg, 19 rue de Vaugirard – Paris 6ème
Jusqu’au 29 juillet 2007
Entrée 10 €
Catalogue de l’exposition, 264 p., 32 €

Image : épingle à chapeau Guêpes, or, émail, opale, diamant (vers 1890-1900)

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Grammaire des Arts Décoratifs. De la Renaissance au post-modernisme

grammairePour ceux qui ont aimé le Musée des Arts décoratifs, ceux qui n’y connaissent rien et le regrettent parfois, ceux qui ont quelques notions éparses des différents styles et souhaitent les préciser et/ou en acquérir une vision d’ensemble, pour ceux, enfin, nombreux, qui se trouvent intimidés au seuil d’une échoppe d’Antiquités, voici un précieux ouvrage : la Grammaire des Arts Décoratifs.

Ce très beau livre devrait combler affamés et curieux : de la Renaissance au post-modernisme, il fait le tour des courants esthétiques majeurs sur une période de plus de 500 ans.

Baroque, Rococo, néo-classicisme, Arts & Crafts, Art Nouveau, Art Déco, Art contemporain … chaque chapitre, après une introduction fort utile qui place le mouvement dans son contexte et en donne les principales lignes, présente un panorama du mobilier, des arts du verre, de la céramique, du textile, papier peint, orfèvrerie …

Illustrée d’une abondante et riche iconographie, la Grammaire présente en outre l’intérêt d’offrir une vision internationale des arts décoratifs. Ainsi, les productions des pays européens les plus dynamiques dans ce domaine, ainsi que les Etats-Unis sont autant représentés que les créations françaises.

Un bel ouvrage à avoir chez soi, à consulter au fil des ans …

A signaler également : les éditions Le Robert ont publié récemment le Dictionnaire des mobiliers et objets d’art du Moyen Age au XXIème siècle. On y retrouve la qualité qui a fait le succès des dictionnaires Le Robert. L’ordre alphabétique permet de proposer une foultitude de notions, y compris les plus techniques. Mais pour une approche plus généraliste et initiatique, le dictionnaire est également aéré de dossiers thématiques sur les principaux courants qui ont marqué les arts décoratifs.

La Grammaire et le Dictionnaire : deux ouvrages de référence qui se complètent parfaitement.

Grammaire des Arts Décoratifs. De la Renaissance au post-modernisme
Noël Rilay, Patricia Bayer
Flammarion
545 p., 70 €

Dictionnaire des mobiliers et objets d’art. Du Moyen Age au XXIème siècle
Anne Lovreglio, Aurélia Lovreglio
Le Robert
480 pages, 42 €

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