Organiser une exposition autour de Giotto di Bondone (vers 1267-1337) ne doit pas être une entreprise aisée.
Les œuvres qu’il a laissées sont en majeure partie des fresques – église de l’Arena à Padoue ainsi que celles illustrant la Vie de saint François à Assise et à Florence – donc fixées à demeure. Seulement trois peintures sont signées de sa main, dont le Saint François d’Assise recevant les stigmates du Louvre, et il faut tenir compte des querelles d’attribution dont nombre d’œuvres sont encore l’objet.
De fait, Giotto ayant imprimé un nouveau style – souvent qualifié de révolutionnaire – et ayant rencontré un grand succès, il a ouvert un atelier dans lequel beaucoup de disciples travaillaient en même temps que le maître et/ou sous ses directives. Dans ces conditions, comme le souligne le Musée, la distinction entre les œuvres de la seule main de l’artiste et celles issues de son atelier est assez peu pertinente.
Cela étant, à force de recherches et de rapprochements, désormais davantage fondés sur les études stylistiques que techniques, la création giottesque, caractérisée par un grand soin accordé aux détails des visages et des corps, à "l’humanité" des expressions, à la clarté de la lumière, à quelques tentatives de rendu, sinon de la perspective au moins de la profondeur est aujourd’hui beaucoup mieux cernée.
Le Musée du Louvre, riche de plusieurs œuvres, a bénéficié de prêts de pièces majeures venues des Etats-Unis, de Londres et de Florence. Il a ajouté à celles-ci des tableaux issus de son atelier ainsi que des exemples de l’art encore très hiératique du style byzantin que Giotto a totalement bouleversé. Enfin, le panorama est complété par des oeuvres d’artistes contemporains mais au coup de pinceau sensiblement différent.
Le tout est didactique, clair, cohérent, et très enrichissant. On laissera le visiteur se rendre compte par lui-même : à côté de l’école traditionnelle du Trecento, la manière de Giotto semble soudain faire apparaître non plus des figures mais des personnes. Délicatesse et expressivité des traits, précision des attitudes, inventivité dans la façon de représenter les scènes traditionnelles de la peinture religieuse – telle la Vierge à gauche du Christ dans la grande Croix du Louvre, qui tourne son visage de l’autre côté : nul doute qu’il y a bien eu un avant et un après Giotto.
Giotto e compagni
Musée du Louvre
Salle de la Chapelle
Tous les jours de 9h à 18h, sauf le mardi
Nocturnes mercredi et vendredi jusqu’à 21h45
Accès avec le billet d’entrée au musée : 11 €
Jusqu’au 15 juillet 2013
Image : Element de predelle, St François prêchant aux oiseaux, Bois © RMN – Grand Palais -Michel Urtado
Fruit de la curiosité de Mag, ou hasard des expositions, ces billets successifs relatent une vitalité des expositions renvoyant à l’espace et au temps, à l’histoire culturelle.
Que de regrets pour les gens du Sud de ne pas avoir l’opportunité de voir cette expo Giotto.
La chaleur de l’été renvoie à celle très intense de l’Ombrie lorsque j’y ai découvert, il y a quelques années, à l’occasion d’une longue ballade pédestre, in situ, les fresques de Giotto : tout imprégné de "la civilisation occidentale médiévale" de Jacques Le Goff, j’y recherchais les traces de cette rupture de la fin du moyen âge qui alliait
– la dynamique des villes et des communes, les républiques, – les grandes hostilités entre les territoires et les puissances, y compris la papauté,
– l’émergence des mondes marchands et les nécessaires collaborations et échanges externes,
– les prolongements des grandes mobilités médiévales (migrations notamment),
– les retours aux sources, à l’essentiel,
– une place nouvelle pour les savoirs et la connaissance, pour la poésie…et la culture…
1 siècle après François d’Assise, autre figure, spirituelle celle là, la mise en image de son hagiographie à Assise (on est passé du roman au gothique) donne ces superbes fresques… qui ne se transportent pas… On y retrouve aussi son maître Cimabue…
Pour rassurer les tenants de la muséographie moderne, de l’œuvre, de son auteur, individuel et isolé dans la fabrication de son art… personne n’a jamais imaginé Giotto, comme Michel Ange, isolé, du haut de leurs échafaudages pour illustrer les supports…
La rupture picturale est en marche, et Giotto, l’homme, l’œuvre, le courant qu’il synthétise ou représente, ouvre les voies de nouvelles composantes, sans complètement abandonner les ors byzantins…
Quelle place dans cette exposition pour Giotto Architecte?
Sa contribution décisive dans le design du campanile de Florence et dans le tout début de la construction inscrit cette vision de la construction future (il avait été nommé maître maçon en raison de sa notoriété dans la représentation picturale) dans la durée, celle de la fabrication, de la construction, de la vie… On oublie aisément de nos jours cette dimension qui relativise très sérieusement la position de l’artiste et le statut de l’œuvre… On pourrait en dire autant de sa contribution à la saga du Duomo…1355-1366, dans un ensemble d’interventions qui vont de 1296 à 1876…
La simplicité du François prêchant aux oiseaux détonne avec ces univers complexes…
Fruit de la curiosité de Mag, ou hasard des expositions, ces billets successifs relatent une vitalité des expositions renvoyant à l’espace et au temps, à l’histoire culturelle.
Que de regrets pour les gens du Sud de ne pas avoir l’opportunité de voir cette expo Giotto.
La chaleur de l’été renvoie à celle très intense de l’Ombrie lorsque j’y ai découvert, il y a quelques années, à l’occasion d’une longue ballade pédestre, in situ, les fresques de Giotto : tout imprégné de "la civilisation occidentale médiévale" de Jacques Le Goff, j’y recherchais les traces de cette rupture de la fin du moyen âge qui alliait
– la dynamique des villes et des communes, les républiques, – les grandes hostilités entre les territoires et les puissances, y compris la papauté,
– l’émergence des mondes marchands et les nécessaires collaborations et échanges externes,
– les prolongements des grandes mobilités médiévales (migrations notamment),
– les retours aux sources, à l’essentiel,
– une place nouvelle pour les savoirs et la connaissance, pour la poésie…et la culture…
1 siècle après François d’Assise, autre figure, spirituelle celle là, la mise en image de son hagiographie à Assise (on est passé du roman au gothique) donne ces superbes fresques… qui ne se transportent pas… On y retrouve aussi son maître Cimabue…
Pour rassurer les tenants de la muséographie moderne, de l’œuvre, de son auteur, individuel et isolé dans la fabrication de son art… personne n’a jamais imaginé Giotto, comme Michel Ange, isolé, du haut de leurs échafaudages pour illustrer les supports…
La rupture picturale est en marche, et Giotto, l’homme, l’œuvre, le courant qu’il synthétise ou représente, ouvre les voies de nouvelles composantes, sans complètement abandonner les ors byzantins…
Quelle place dans cette exposition pour Giotto Architecte?
Sa contribution décisive dans le design du campanile de Florence et dans le tout début de la construction inscrit cette vision de la construction future (il avait été nommé maître maçon en raison de sa notoriété dans la représentation picturale) dans la durée, celle de la fabrication, de la construction, de la vie… On oublie aisément de nos jours cette dimension qui relativise très sérieusement la position de l’artiste et le statut de l’œuvre… On pourrait en dire autant de sa contribution à la saga du Duomo…1355-1366, dans un ensemble d’interventions qui vont de 1296 à 1876…
La simplicité du François prêchant aux oiseaux détonne avec ces univers complexes…