Harmonie, beauté, cohérence : malgré la diversité des inspirations nettement visibles ici ou là dans les oeuvres du catalan Julio Gonzales (1876-1942), l’exposition qui se tient jusqu’au 8 octobre au Centre Georges Pompidou imprime le sentiment d’une homogénéité certaine.
On sent la solitude de l’artiste qui a souvent regardé autour de lui, fréquenté et travaillé avec ses contemporains – notamment avec Picasso dont il fut le praticien pour la réalisation de ses constructions en fer entre 1928 et 1932 –, mais s’est toujours gardé de s’engouffrer complètement dans le souffle solide des courants de son temps, en particulier le surréalisme et le cubisme.
Ces mouvements ne seront qu’approchés, inspirés, frôlés.
L’exposition met merveilleusement en évidence le parcours de l’artiste inventeur de la sculpture en fer, dont l’influence sur l’évolution de l’art au XXème siècle fut indéniable.
Ce parcours, c’est une origine – la ferronnerie d’art familiale –, des débuts – dessins magnifiques à la Degas dans les années 1910 à 1914 –, du talent – remarquable de bout en bout sur tous les supports qu’il a exploités –, des recherches – qui ont la grâce de demeurer « invisibles » –, un regard éveillé et curieux – cf. les influences –, parcours qui s’achève par un retour aux débuts (forcé, il est vrai par le manque de matières premières pendant l’occupation) avec le dessin, mais complètement transformé, moderne, au trait puissant et expressif.
L’évolution de ses créations sculpturales est remarquable. Aux nus féminins en bronze, tour à tour sensuels et mélancoliques succèdent les premiers reliefs en fer, visages découpés à même la feuille de métal.
Il adjoint vite barres et plaques pour élaborer des oeuvres dans lesquelles les espaces vides créés autour de la matière sont partie intégrante de la sculpture. Julio Gonzales parle alors de « dessin dans l’espace ». Ce sont des oeuvres autour desquelles on aime tourner, pour découvrir autant d’aperçus différents que d’angles de vue, tels cette Petite danseuse, cette Chevelure, ou Le Rêve Le Baiser (1934) aux proportions parfaites, tout en légèreté, force et dynamisme. Ou encore, l’une des plus belles sculptures de l’exposition, L’Ange, L’Insecte, La Danseuse (1935), silhouette hybride humaine et zoomorphe, tout droit sortie du fantastique.
Après la célèbre Montesserat, sculpture réaliste de femme criant (exposée près du Guernica de Picasso dans le pavillon espagnol de l’Exposition internationale de Paris de 1937), symbole des souffrances du peuple espagnol pendant la guerre civile, les dernières sculptures, à la fin des années 1930, une fois encore à la frontière du réalisme et de l’abstraction, mi-cactus mi-figures humaines, expriment de façon très manifeste la violence de l’époque en Europe. Ce sont les seules oeuvres porteuses d’agressivité.
Les autres évoquent des émotions plus « rentrées », mais aussi vie et mouvement.
Et, toujours, ressort une singularité, une profonde puissance créative, un élan vital hors du commun.
Julio Gonzales
Centre Pompidou
Jusqu’au 8 octobre 2007
Tlj sauf le mardi de 11 h à 21 h
Entrée « musée et expos »10 € (TR 8 €)
Catalogue 340 p., 49,90 €
Image : Jeune fille fière (1934-1936), Bronze, ADAGP- Coll. Centre Pompidou,Paris, Dist. RMN (photo : Philippe Migeat)