En ce premier jour de l’année, maglm inaugure une nouvelle étape de sa collaboration avec Andreossi, qui nous a régalés de son feuilleton sur les prix Goncourt.
En 2022, place à son « concurrent » : le prix Femina !
Premier billet : La conquête de Jérusalem de Myriam Harry. Bonne lecture, belles (re)découvertes et très heureuse année 2022 à toutes et à tous avec les prix Femina !!
Mag
Avec La conquête de Jérusalem, Myriam Harry apparaissait comme favorite pour le prix Goncourt 1904, qui fut en fait attribué à Léon Frapié pour sa « Maternelle ». Un collectif féminin, en particulier du journal « La Vie Heureuse » décida d’octroyer un prix, qui deviendra par la suite le Fémina, à Myriam Harry pour rétablir ce qu’il leur semblait une injustice. Il est vrai que ce n’est que quarante-quatre ans plus tard seulement que le Goncourt a été accordé à une auteure, Elsa Triolet.
Le roman ne manque pas de qualités, soulignées d’ailleurs à sa sortie par Léon Blum : « Il sent le désert, les fleurs sauvages et les parfums d’Arabie ». On y trouve en effet le charme de cette ville, Jérusalem, très cosmopolite, où cohabitaient dans une ambiance plus ou moins tolérante, mais sous un régime de concurrence, les diverses religions du monothéisme. L’écrivaine, qui y était née et y avait passé son enfance sait très bien rendre l’atmosphère de la fin du XIXe siècle sous la domination turque.
Elle nous fait suivre la vie de Hélie Jamain, jeune archéologue, qui épouse Cécile, diaconesse protestante, fille de pasteur. Très amoureux, il déchante rapidement devant la rigueur sexuelle de sa femme sitôt revenue du voyage de noce : « Ne parle pas de cela, Hélie, dit-elle tout bas ; nous étions des égarés ; et puis c’était notre voyage de noce. –Et maintenant ? –Maintenant nous sommes des gens sérieux ». Nous avons là une thématique constante du roman, l’opposition entre la sensualité moyen-orientale et l’austérité religieuse.
Notre Hélie devient très critique vis-à-vis du tableau que lui présente Jérusalem: « Une tourmente de folie et de fanatisme ravageait la Palestine. Au Liban, Druses et Maronites s’entr’égorgeaient. Les musulmans, à Damas, menaçaient tous les chrétiens ; à Gaza les catholiques avaient brûlé une synagogue (…) ». Aussi se tourne-t-il vers les croyances anciennes et projette d’écrire « La Résurrection du Paganisme » et rêve d’Astarté, l’idole païenne. Mais sa quête échoue, comme a été brisé son désir de retrouver avec Cécile les jours heureux du voyage de noce.
Il nous reste le souvenir de la vie dense et colorée de cette ville, jusque dans les cimetières : « Au-dessus des sépulcres, des négresses tendaient des vélums ; les marchands de cacaouettes et de nougat gaiement choquaient leurs timbales de cuivre, des effendis en caftans clairs se dandinaient en égrenant des chapelets d’ambre derrière le dos. Accroupies sur des tapis, les grandes dames de harem se saluaient de tombe en tombe, mangeaient, fumaient, potinaient, ‘respiraient le vent’, s’aspergeaient d’eau de rose, et, de temps en temps, penchées familièrement vers le turban de pierre, murmuraient quelque chose ; puis, songeuses, prêtaient l’oreille comme pour une confidence posthume ».
Andreossi