La galerie des Gobelins organise une nouvelle fois une exposition d’œuvres exceptionnelles en accueillant jusqu’au 4 juillet vingt-six tapisseries flamandes du XVI° siècle commandées par les Habsbourg et appartenant au Patrimoine National espagnol.
Petit rappel historique : dès la fin du XIV° siècle aux Pays-Bas les ducs de Bourgogne acquièrent de précieuses tapisseries et les utilisent comme somptueux symbole de pouvoir. A la fin du siècle suivant, les Pays-Bas se trouvent entre les mains des Habsbourg, qui poursuivent la même politique artistique. Unie rapidement aux Espagnols grâce au mariage de Jeanne de Castille (dite La Folle) et de Philippe le Beau, dont naîtra le futur Charles Quint, la dynastie ne cesse d’enrichir ses collections de tapisseries, en particulier grâce à Marguerite d’Autriche et à Marie de Hongrie, respectivement tante et sœur de l’Empereur Charles Quint.
A l’époque, les tapisseries étaient à plus d’un titre des éléments fondamentaux des trésors de la Cour : ornementation murale monumentale, ces pièces étaient également pratiques puisqu’elles protégeaient de l’humidité et du froid et étaient en outre aisément transportables – détail d’importance pour un souverain comme Charles Quint qui se déplaçait constamment dans son vaste royaume. Plus encore, le luxe de ces tapisseries, réalisées aux Pays-Bas en fils de soie, d’or et d’argent permettait d’étaler le prestige et la magnificence de leur commanditaire. Elles étaient d’ailleurs dans les inventaires les objets les plus coûteux après les bijoux et l’argenterie.
Enfin, les Habsbourg n’hésitèrent pas à les utiliser comme vecteur de propagande : l’iconographie narrative devait servir l’image de Charles Quint, celle d’un empereur puissant et victorieux. Avec Remus et Romulus, La Fondation de Rome, l’une des pièces maîtresses de l’exposition relie le pouvoir impérial à l’une des sources classiques les plus prestigieuses. La Bataille de Zama de Jules Romains, brillant élève de Raphaël évoque l’ultime bataille qui opposa Scipion et les Romains aux Carthaginois, d’après le récit de Tite-Live. La Fortune, réalisée par Pieter van Aelst l’une des neuf tapisseries de la tenture Les Honneurs commandée par Charles Quint vers 1523 renvoie à l’apogée du Saint Empire germanique romain.
Dans un genre tout différent, un autre chef d’œuvre à ne pas louper : La Charrette de foin (dite aussi La Tentation de Saint-Antoine), fortement inspirée de l’œuvre peint de Jérôme Bosch souligne par moult allégories, monstres, diables, globe terrestre, la débauche, la sottise et la cupidité des hommes.
Trésors de la Couronne d’Espagne – Un âge d’or de la tapisserie flamande
Une exposition du Mobilier National, de la Sociedad Estatal para la accion cultural Exterior (SEACEX) et de la Fondation Carlos de Amberes (Madrid, 1594)
Commissaire Fernando Checa, professeur à l’université de Madrid
et ancien Directeur du Prado
Galerie des Gobelins
42, avenue des Gobelins – Paris 13°
M° Gobelins, ligne 7
Jusqu’au 4 juillet 2010
TLJ sf lun. et 1er mai, de 11 h à 18 h
Entrée 6 € (TR 4 €), gratuit le dernier dim. du mois
Image : Atelier de Bruxelles, tenture La Tentation de Saint-Antoine, La Charrette de foin. D’après Jérôme Bosch. Or, argent, soie et laine. 2,98 m x 3,68 m. Patrimonio Nacional, Madrid. © Patrimonio Nacional, Madrid