Les mots manquent pour rendre compte de l’émotion éprouvée lors du magnifique concert de Christophe à la salle Pleyel vendredi dernier, ultime étape parisienne avant la reprise de sa tournée Les vestiges du Chaos, du nom de son très réussi dernier album.
Parfaitement orchestrée – à tous points de vue du reste – et sans pour autant donner l’impression d’un timing trop bien réglé, la soirée s’est déroulée en deux parties.
La première a été l’occasion de redécouvrir en intégralité Les Vestiges du Chaos, dans une éblouissante mise en scène signée Jérémie Lippmann. Une ambiance nocturne, qui mettait les musiciens en valeur dans des cubes de lumière surélevés. Pas de parois, seulement des arrêtes en néons scintillant en couleurs et variations rythmiques, en écho à de savant jeux de spots colorés. Plein les mirettes, quoi, mais jamais trop. Avec Christophe, rien se saurait être too much.
Lui est sur le devant de la scène, tranquille sur son tabouret derrière un micro sur pied. Il chante et parle au public comme le prince qu’il est, toujours extrêmement présent, simple et sophistiqué à la fois, décontracté avec classe, orgueilleux et plein d’humour, y compris sur lui-même.
Derrière lui, il y a des décennies de musique et de création, et cela s’entend. Mais jamais on ne pense à un « vieux chanteur ». Septuagénaire paraît-il. Ah bon. Comment fait-il ?
Il y a d’abord ses chansons, d’une modernité folle, avec des sons ultra-travaillés, des musiques planantes, des rythmes qui alternent envolées célestes et accélérations jubilatoires. Ensuite, sa voix, ce filet inimitable qui monte et descend en souplesse, juste patiné d’un grain superbe qui en fait toute la singularité. Enfin, il y a ce que Christophe dégage, si insaisissable, cet homme qui sait se montrer discret et loquace, complice et sauvage, direct et plein de respect.
Après l’entracte, l’artiste fait intervenir un danseur de flamenco : sobriété, classe, puissance, lyrisme, en quelques minutes « l’hypnose » flamenca opère et le public est captivé.
Christophe peut lors surgir à nouveau, assis à son piano glissant doucement sur la scène, pour entonner les grands succès de son répertoire. Au fil de réinterprétations qu’il sait faire à la fois surprenantes et fidèles, Christophe met tour à tour chacun de ses musiciens à l’honneur. Une véritable démonstration de leur talent – pas un passage pour la forme comme d’ordinaire – le temps d’une chanson entière.
Bien sûr, on retiendra les magnifiques réinterprétations des Marionnettes (dans un duo avec le public fort juste), des Mots bleus, d’Aline… Ce soir, elles n’ont pas pris une ride, pas le moindre signe d’usure après tant de temps et d’écoutes. La preuve, dans cette seconde partie aussi, que l’artiste sait s’entourer, travailler, créer et se réinventer sans cesse. Jamais il ne semble se reposer sur ses lauriers : c’est peut-être cela la clef d’une modernité qui frise l’avant-garde, d’une endurance si élégante, de spectacles si féeriques.
Christophe, concert du vendredi 3 février 2017 à la salle Pleyel
Toutes les dates de la tournée ici