L’Atelier de Man Ray, Unconcerned but not indifferent

L'Atelier de Man Ray à la Pinacothèque de Paris, HemingwayAvec L’Atelier de Man Ray, Unconcerned but not indifferent (Détaché mais pas indifférent), la Pinacothèque de Paris présente jusqu’au 1er juin une vaste sélection de peintures, dessins, collages, sculptures, objets et photographies de Man Ray.

Il faut rappeler que le célèbre photographe a exploré bien des supports, n’hésitant d’ailleurs pas à mélanger les genres, notamment en retravaillant les photos à la peinture ou au dessin.

A New-York, où il débute sa carrière de photographe, il est séduit par la peinture moderne européenne découverte dans les galeries, mais également par la révolution avant-gardiste engagée par Marcel Duchamp et Francis Picabia.
Aussi, il ne s’éternise guère de ce côté-là de l’Atlantique et s’installe dès 1921 à Paris, où il est immédiatement adopté par le groupe Dada, devient l’amant de celle qui sera bientôt Kiki de Montparnasse, avant de suivre André Breton dans l’aventure surréaliste.
Américain il restera, mais Américain de Paris avant tout : son séjour aux Etats-Unis durant les années 1940 ne l’enchantera guère, il retournera à Paris dès 1951 et y finira ses jours en 1976.

Les oeuvres exposées (prêtées à titre exceptionnel par le Man Ray Trust à New-York), mêlant dessins, photos, lithographies, objets uniques, objets personnels et documents sources, permettent ainsi de suivre le parcours passionnant d’un artiste qui a côtoyé et photographié les plus grands de son temps.
L’on y retrouve tous les acteurs de cette période foisonnante que fut la première moitié du XXème siècle en France.
Celui qui fut érigé au statut de photographe d’art (grâce notamment au procédé du rayogramme) était en effet un portraitiste couru qui collaborait régulièrement à Harper’s Bazaar, Vogue, Vu et autre Vanity Fair.

Voici donc le magnifique profil de Picasso, voici Kiki, mutine sous son chapeau cloche, voici encore Cocteau, Hemingway, Gris, Léger, Derain, Satie, Giacometti…
Plus loin, après avoir admiré un classique et somptueux portrait d’Ava Gardner, l’on découvrira deux minuscules diapositives peintes, datées des années 1950, l’une montrant Yves Montant, l’autre Juliette Gréco. Elles sont intimes, elles sont tendres, à l’opposé de bien d’autres oeuvres pleines de puissance de cet artiste assurément multiple et complexe.

L’Atelier de Man Ray, Unconcerned but not indifferent
Pinacothèque de Paris
28, place de la Madeleine – Paris 8ème
Jusqu’au 1er juin 2008
Tlj de 10 h 30 à 18 h
Entrée 7 € (TR 5 €)

Image : Yves Montant, 1950, Diapositive peinte, 8,89 x 6,35 cm © Man Ray Trust – ADAGP Paris 2008

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Bernard Plossu. Couleur Fresson

Exposition Bernard Plossu, Couleur Fresson à NiceAvec une sélection de 130 photographies en couleurs, le Théâtre de la photographie et de l’image à Nice présente jusqu’au 16 mars une partie peu montrée du travail de Bernard Plossu.

Ce globe-trotteur devant l’éternel, né au Vietnam en 1945 et marqué par les idées de la beat generation a entamé très tôt sa carrière, consacrée essentiellement à la photo de voyage.
De renommée internationale, il a reçu le Grand prix français de la Photographie après la rétrospective organisée au Centre Pompidou en 1988, Les paysages intermédiaires.

Davantage connu pour ses photos en noir et blanc, Bernard Plossu a réalisé parallèlement une oeuvre en couleurs singulière et passionnante.
Tirées au « Fresson », procédé au charbon direct inventé par Théodore-Henri Fresson vers 1890 et dont le propre fils Pierre réalisa le premier tirage couleur en 1952, les photographies de cette exposition, qui couvrent quarante ans de travail (1965-2005) emmènent le visiteur dans d’autres mondes.

Les scènes sont pourtant tout ce qu’il y a de plus réaliste : des paysages classiques, des scènes urbaines ordinaires et populaires, des objets du quotidien.
Mais le grain particulier, très mat, du procédé Fresson intercale un imperceptible voile entre le sujet photographié et le spectateur, à qui toute place est ainsi faite pour la contemplation et l’envol de l’imaginaire.
Car les photos de Bernard Plossu sont profondément belles tout en étant épargnées du clinquant, et cette absence d’agressivité des couleurs prête au rêve. Voici des scènes de rue et de route, aux Etats-Unis, à Paris ou ailleurs en Europe, captées à cette indéfinissable heure du soir, « entre chien et loup » : pluie et brouillard peut-être, les vues se déclinent dans une tonalité de bleus qui entraîne bien loin de ces lieux.

Les paysages du Mexique et du Nouveau-Mexique (ci-dessus) sont certainement les plus beaux de l’exposition : le ciel lui-même semble devenir le protagoniste principal de la photo ; le gris orage se pare d’une lumière presque surnaturelle qui donne aux grands espaces une intensité dramatique impressionnante.

Mais ces tirages en couleurs ont aussi leur paradoxe : le procédé Fresson renforce l’âge de la scène (typiquement : des mariés dans une fête foraine ou un homme charriant un sac de charbon, deux photos prises en France en 1968 ; ou encore un décor d’intérieur sans homme, mais qui en dit long, dans le sud du Maroc en 1975). L’irréalité de ces clichés aux sujets prosaïques – mais ainsi mis à distance – en fait des images de souvenir pur, des scènes d’histoire ; elles sont en cela presque des scènes en noir et blanc.

Théâtre de la Photographie et de l’Image Charles Nègre
27, boulevard Dubouchage – Nice
TJL sauf le lundi de 10 h à 18 h
Entrée libre
Catalogue (TPIN), 144 p., 31 €

Image : Roads-Monument Valley 1982 © Bernard Plossu

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Steichen, une épopée photographique

Expo Steichen, Jeu de Paume, Fred AstaireL’Américain Edward Steichen (1879-1973) semble avoir tout fait, et toujours premier parmi les premiers.
Influencé par le symbolisme, l’impressionnisme et l’orientalisme, il introduit l’art dans la photographie au tout début du XXème siècle. Ses images dites pictoralistes effleurent dans une atmosphère voilée des corps nus énigmatiques, évoquent plus qu’elles ne les montrent des paysages, arbres, neige et cours d’eau dans une ambiance floue et poétique proche de la peinture.

A Paris, chez Gertrude et Léo Stein, il rencontre Toulouse-Lautrec, Renoir, Manet, Cézanne, Matisse, Picasso, Brancusi et les fait connaître de l’autre côté de l’Atlantique en les exposant dans sa galerie new-yorkaise. Il photographie Richard Strauss à la façon d’un personnage sorti du fantastique, mais aussi Matisse, Jaurès, Roosvelt et bien sûr Auguste Rodin. A Meudon, il réalise d’étranges clichés du Balzac de Rodin, mi-homme, mi-fantôme surgissant dans une lumière crépusculaire effrayante.
Il réalise de lui-même, bel homme, d’étonnants et remarquables autoportraits.

Mais cette approche "romantique" ne sera qu’une période, qu’il abandonnera résolument au cours de la Première Guerre mondiale, alors engagé dans la photographie militaire.
Avec les années 1920 débute donc la seconde manière de Steichen, dite moderniste.
Nommé photographe en chef des magazines Vogue pour la mode et Vanity Fair pour les mondanités, il devient LE photographe es-célébrités et monde du luxe. Sous son objectif, les robes des grands couturiers semblent des oeuvres d’art dont la perfection laisse encore aujourd’hui pantois ; les portraits de personnalités (toutes y sont passées) sont systématiquement réussis. Il joue avec la lumière artificielle et les ombres avec une virtuosité sans appel. Son talent pour mettre en valeur avec art et précision s’exerce jusque dans la publicité.

Sa créativité dépassera le strict champ photographique. Pour le textile, il photographie des objets insolites (riz, haricots, lunettes, boutons, fil…) en plan rapproché ; une fois transposée en couleur, l’image est répété sur l’imprimé. Les motifs abstraits qui en résultent – d’un superbe style "Arts Déco" – connaissent un grand succès.

A la fin des années 1930, ce passionné d’horticulture sera aussi le premier à faire entrer ses fleurs dans un musées – et au MoMA s’il vous plaît ! Il en sera d’ailleurs nommé directeur du département de photographie en 1946.
Présentée en 1955 après trois ans de recherche en Europe et aux Etats-Unis, l’exposition qu’il a mise en place The Family of Man, destinée à promouvoir la solidarité entre les peuples par le rapprochement d’images du monde entier, circulera dans trente-huit pays. Plus de neuf millions de personnes l’auraient vue jusqu’en 1962. Une version restaurée est aujourd’hui installée de manière permanente au Luxembourg, pays où il est né.

Steichen, une épopée photographique
Jeu de Paume – site Concorde
1 place de la Concorde – Paris 8ème
Jusqu’au 30 décembre 2007
Mar. de 12h à 21h, mer. au vend. de 12h à19h, sam. et dim. de 10h à 19h
Tél. 01 47 03 12 50

Image : Fred Astaire dans le film Top Hat, New York, 1927, Edward Steichen, Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York © 1927, Condé Nast Publications

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"Réquisitoire", Le plancher de Jean. Martin d'Orgeval à la MEP

Martin d'Orgeval, le plancher de JeanSi l’histoire est désormais connue, elle mérite d’être racontée une nouvelle fois et surtout montrée.
Il s’agit d’une histoire réelle de souffrance et de folie dont le travail du photographe Martin d’Orgeval est un précieux document.

En 1959, Jean, fils de paysan béarnais, revient de la guerre d’Algérie pour prendre le rôle de chef de famille auprès de sa mère et de sa soeur Paule.
Son père s’est pendu.
Jean est âgé de 20 ans.

Il néglige la prospère ferme, qui périclite ; il se livre en revanche à des rondes de garde assidues, monté sur son tracteur et armé d’un fusil.
Jean, Paul et leur mère ne voient plus personne et se nourrissent de cueillette.

En 1971, la mère meurt. Jean et Paule demandent et obtiennent l’autorisation de l’inhumer sous l’escalier de la maison.
C’est alors que Jean finit de sombrer dans la folie.
Pendant des mois, cessant de se nourrir, il passe ses journées enfermé dans sa chambre, dont il grave entièrement les 16 m2 de plancher autour du lit.
Il mourra d’inanition quelques mois plus tard, à l’âge de 33 ans.
Paule finira sa vie absolument recluse et c’est à sa mort, en 1993, que le "plancher de Jean" est découvert.

Les mots que l’on y lit révèlent une violence intérieure tendue, des sentiments de persécution, en particulier vis-à-vis de l’Eglise [LA RELIGION A INVENTE DES MACHINES A COMMANDER LE CERVEAU DES GENS ET BETES ET AVEC UNE INVENTION A VOIR NOTRE VUE A PARTIR DE RETINE DE L’IMAGE DE L’OEIL ABUSE], de menace, de haine, et d’innocence [NOUS JEAN PAULE SOMMES INNOCENTS NOUS N’AVONS NI TUE NI DETRUIT NI PORTE DU TORT A AUTUI C’EST LA RELIGION QUI A INVENTE UN PROCES AVEC DES MACHINES ELECTRONIQUES A COMMANDER LE CERVEAU]. Il évoque aussi le meurtre, Hitler, la guerre.

Témoignage poignant de la folie d’un homme, ces planches couvertes de mots gravés, assénés, frappés, obsédants, apparaissent comme le cercueil jeune et inéluctable de sa maladie et de ses souffrances non soignées. L’aspect christique de son oeuvre qui a la religion pour première cible est évidemment bouleversant.

Jean souffrait visiblement de schizophrénie. Le professeur Jean-Pierre Olier, chef du service hospitalo-universitaire Saint-Anne à Paris, a voulu que le plancher de Jean soit exposé en permanence à l’hôpital Saint-Anne (1), pour combattre la honte et les préjugés que suscitent encore les maladies mentales.

"Réquisitoire", Le plancher de Jean. Martin d’Orgeval
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 6 janvier 2008
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

(1) En attendant d’être dans le bâtiment lui-même (vers 2010 probablement), le plancher de Jean est exposé, depuis juillet 2007, juste en face, sur le trottoir de la rue Cabannis.

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Tulsa. Larry Clark à la Maison européenne de la photographie

Exposition Larry Clark à la MEP, TulsaIls sont des adolescents et de jeunes adultes aux cheveux mi-longs ; parfois souriants, beaux souvent.

Les photos sont prises sur le vif mais les scènes annoncent la mort.
Point de mouvement si ce n’est l’aiguille qui s’enfonce lentement dans le bras ou le mollet pour délivrer la dose libératrice au corps déjà condamné.

Sur ces vies de désœuvrement et d’ennui, où même l’attente est refusée, coule une goutte de sang, marqueur de la putréfaction prochaine de ces blanches chairs déjà flasques.
C’est une jeunesse qui abdique, un amant qui injecte la mort à sa partenaire, une femme enceinte qui se pique, un nouveau-né dans un petit cercueil blanc.

A côté, les clichés montrant des adolescents jouant avec des armes à feu résonnent comme des métaphores.

Photos frontales, provocantes, choquantes et surtout, révoltantes.

Tulsa. Larry Clark
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 6 janvier 2008
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

Né à Oklahoma en 1943, Larry Clark a photographié dans les années 1960 la jeunesse en prise à la violence et la drogue. Le recueil issu de ce travail Tulsa a été édité pour la première fois en 1971, réédité en 1983 puis en 2000 (anglais, éditions Grove Press Books).

Image : Tulsa, 1963-1971

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Harlem in My Heart. Martine Barrat à la MEP

Martine Barrat, Harlem in My HeartMartine Barrat a quitté Paris pour New-York en 1968. Ce sont les quartiers pauvres de Harlem et de South Bronx, où elle s’est investie pendant des années, qu’elle a choisi de photographier.
Ses clichés n’ont pourtant rien de misérabiliste, ni de compassionnel. Il s’en dégage au contraire une grande dignité, parfois même une franche gaieté.

Tirages somptueux en noir et blanc montrant la communauté noire dans la rue, dans les églises, dans les ‘’dancings’’ : enfants qui jouent et dansent dehors ; couple d’âge mûr enlacé ; ‘’diva’’ toute plissée prête pour une dernière soirée… le spectacle ne semble pouvoir s’arrêter.
Dans la rue, les vieillards de Martine Barrat ne cèdent pas davantage au laisser-aller ; malgré l’âge et la solitude, l’élégance est toujours là, comme si c’était la dernière chose à perdre. Et ce môme qui pose, bras nus sous son gilet noir, drapé d’une écharpe blanche : quelle classe !

Au fil des photos, la sensualité des étoffes et des peaux satinés affleure ; l’émotion aussi, par exemple devant ces enfants assis dehors sur un grand escalier délabré, discutant au dessus de leurs cahiers, le reste des livres calés sur les marches par de gros cailloux ; ou encore devant cette jeune femme qui fume en rêvant dans sa robe de soirée…
On pourrait continuer longtemps tant ces photos touchent et parlent.

Lorsqu’elle photographie le monde de la boxe, Martine Barrat nous offre le même regard précis et attachant : avant le combat, les masses de muscle pur s’immobilisent dans une concentration extrême, soulignée par une position, un regard ; le « physique » prend tout à coup une expression cérébrale, voire mystique dans ce moment de solitude qui en précède un autre, celui du match, qu’on ne fait ici qu’imaginer.

Harlem in My Heart. Martine Barrat
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 6 janvier 2008
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

Image : Sunday Morning, Harlem, New York, 1984

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Dunkerque l'Européenne : De Gerhard Richter à Markus Sixay, Particules d'histoire

Gunter Forg, Installatie 2Gunter Forg, Installatie 1Après l’Espagne en 2003, avec un programme parrainé par Jorge Semprun, puis l’Angleterre en 2005, pour sa troisième édition, la biennale de culture contemporaine Dunkerque l’Européenne se tourne vers l’Allemagne contemporaine.

Jardins d’artistes, théâtre, danse, musique, expositions, cinéma, rencontres et débats ponctuent cette manifestation qui se déroule du mois de mai à novembre 2007, sous la signature de Jérôme Clément, président d’Arte-France, vice-président d’Arte.

Au LAAC (Lieu d’Art et d’Action Contemporaine) de Dunkerque la création plastique allemande est mise en valeur à travers l’exposition De Gerhard Richter à Markus Sixay… Particules d’histoire.

Ni exposition explicitement thématique, ni panorama complet, elle propose un regard sur la diversité et la vitalité de la scène allemande de 1970 à nos jours en peinture, sculpture, photo, installation.
Cette approche permet au visiteur, au fil de huit espaces judicieusement aménagés, de retrouver des artistes connus, d’en découvrir d’autres, d’établir des correspondances… et d’être souvent surpris.

C’est le cas lorsqu’il voit à ses pieds un carré blanc immaculé d’une étonnante brillance, intitulée Pierre de lait (1978) : une plaque de marbre légèrement concave recouverte de véritable lait ! Influencé par la spiritualité orientale, Wolfgang Laib a conçu son oeuvre comme un rituel d’offrande. Chaque matin, le réceptacle minéral est rempli de deux litres et demi de lait…
Esthétique minimaliste, pureté, cette création, au-delà de son côté anecdotique, détonne et inspire à une contemplation toute méditative.

Audace, surprise toujours, dans l’espace consacré à Gerhard Richter, l’artiste de ces vingt dernières années le plus connu en Allemagne. Ses "tableaux photographiques", reproductions picturales aux contours flous de photographies, ses monochromes gris sont bluffants. A côté, un grand et très beau tableau abstrait, Athen (1985) avec son explosion de couleurs vives dégage une formidable énergie. La puissance créative de l’oeuvre de cet artiste difficile à "dater" et à classer l’impose au premier plan de l’exposition.

Plus loin, on retrouvera un artiste multidisciplinaire dont on a déjà parlé côté peinture (qui est montré jusqu’au 9 septembre à l’hôtel des Arts de Toulon), Günter Förg. Ici sont installées face à face deux grandes photographies qui se répondent (Intallatie, 1986), portraits d’une toute jeune fille à deux âges différents, qui se reflètent l’une dans l’autre : enfance, temps qui passe, souvenirs… un ensemble éloquent et très touchant.
Si on ne peut citer tous les artistes exposés ni la diversité de leurs inspirations, on ne peut faire l’impasse sur la photographie objective allemande, en particulier avec les oeuvres du couple Bernd et Hilla Becher, qui, dès 1959 ont commencé à photographier des bâtiments industriels tels les hauts-fourneaux, les fours à charbons, les châteaux d’eau… Pris de face, ils sont présentés en séries de sujets identiques et créent une typologie d’éléments de l’industrie minière en Allemagne, mais aussi dans le reste de l’Europe et aux Etats-Unis.

Dans cette veine, appelée Ecole de Düsseldorf (du nom de l’académie où Bernd Becher enseigna), d’autres artistes leur ont emboîté le pas, tel Thomas Struth qui photographie les villes avec une objectivité poussée à l’extrême, montrant des immeubles sans leurs habitants mais dont l’architecture révèle les groupes sociaux qui les occupent. Ses photos froides et frontales l’inscrivent dans la mouvance de ceux qu’on pourrait appeler les "photographes-antropologues"…

De Gerhard Richter à Markus Sixay, Particules d’histoire
Dunkerque l’Européenne 3
LAAC de Dunkerque
Jusqu’au 28 octobre 2007
Jardin des sculptures – 59140 Dunkerque
parking rue des Chantiers de France
tél. : 03 28 29 56 00
mél. : art.contemporain@ville-dunkerque.fr
TLJ sauf le lundi
Mar., mer. et ven. : de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h 30
Jeu. de 10 h à 12 h et de 14 h à 20 h 30
Sam. et dim. de 10 h à 12 h 30 et de 14 h à 18 h 30

Image : Günther Förg, Installatie, 1986 © SMAK Gand

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Le cuir des arbres. Marc Fumaroli. Maison européenne de la photographie

Le cuir des arbres, Marc Fumaroli« Les arbres, a dit un sage un peu misanthrope, me consolent des hommes mieux que les animaux, avec lesquels ils ont trop de ressemblance.

J’ai été tenté de faire des portraits photographiques d’arbres. Aucun n’a répondu au sentiment qu’ils m’inspirent. Alors je me suis rabattu sur la vue rapprochée, et j’ai découvert que la photographie pouvait du moins fixer ce que l’on ne regarde le plus souvent qu’en passant et distraitement, le cuir des arbres.

Par la brève anthologie que propose cette exposition, je souhaite partager avec les promeneurs en forêt, les visiteurs de jardins botaniques, les explorateurs de pays lointains, les joies esthétiques que donne l’incroyable et infaillible génie plastique de la Nature, graveur et peintre " abstraits " sur le cuir de nos amis les arbres… ».

C’est ainsi que Marc Fumaroli présente lui-même ses clichés exposés à la Maison européenne de la photographie jusqu’au 2 septembre.

Tout semble être dit.
Il ne reste plus qu’à contempler tranquillement les très grands tirages en couleur et laisser son imagination prendre son envol à la surface des arbres.

Apparaîtront alors peut-être des vues du ciel, ici terre découpée et archipel d’îles vertes, là chemins ocres tracés dans la forêt.
Ou encore, dans un camaïeux de verts et de gris, la peau d’un serpent, à moins que cela ne soit celle d’un autre reptile ; ailleurs, couleur chair, voici une parcelle de peau humaine, quand plus loin deux photos côte à côte, « oeils » sur les troncs d’arbres forment ensemble un visage humain creusé de sillons et de rides.

Tout cela est peut-être gravé dans le cuir des arbres.
C’est aussi simple que poétique.
Il n’y a qu’à regarder.

Le cuir des arbres. Marc Fumaroli
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 2 septembre 2007
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

Image : Le cuir des arbres, Marc Fumaroli, 2006

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Italie, doubles visions. Maison européenne de la photographie

Scanno, Henri Cartier-BressonAvec Italie, doubles visions, la Maison européenne de la photographie propose jusqu’au 30 septembre un enrichissant voyage en Italie.

Déclinée en dix thèmes organisés autour d’une centaine de photos, l’exposition propose deux regards différents sur un même site ou un même événement italien.

Les travaux d’un photographe autochtone et d’un photographe international présentés à proximité donnent lieu à de belles comparaisons.

Scanno, un village des Abruzzes, avec son église, sa place, ses enfants et ses vieillards, silhouettes, chapeaux et coiffes noires, fut photographié tour à tour par Henri Cartier-Bresson et Mario Giacomelli.
D’un côté les clichés impeccables, le regard fin et original de celui qui fut l’un, sinon le plus grand des photo-journalistes.
De l’autre, la singularité et la poésie du photographe italien le plus connu.
Deux variations profondément différentes dont la présentation simultanée ne fait que renforcer leurs beautés respectives.

Mais certaines de ces confrontations sont aussi l’occasion de souligner la puissance créative de photographes moins connus.
Ainsi du thème des volcans, classiquement interprété par l’Américian Roger Ressmeyer, avec des clichés très "National Geographic" (il y travailla de 1987 à 1995), mais totalement réinventé par Antonio Biasiucci qui photographie de très près lave, magma et fumée, pour saisir non pas le mouvement effrayant et spectaculaire de la lave incandescente, mais les plis, le lissé, les bulles et stries de la matière volcanique dans un noir et blanc très sensuel.

Ou encore, lorsque le brésilien Sebastiao Salgado fait un reportage sur les thoniers, il en restitue l’action et le formidable danger, alors que Giorgia Fiorio fait de ces pêcheurs des êtres de l’attente, émouvants et mélancoliques.

Une veine poétique décidément très présente chez les photographes italiens : coup de coeur pour la Venise de Luca Campigotto, qui photographie sa ville de nuit, tout en silence et mystère, ombres larges et lumières furtives, détours et dédales de pierres humides ; une promenade dans une Venise littéraire qui semble surgir d’un rêve profond.

Le thème le plus fort de l’exposition demeure certainement celui des reportages réalisés dans les hôpitaux italiens par Carla Cerati et Raymon Depardon.

A la fin des années 1960, afin de dénoncer les conditions de vie des malades mentaux dans les hôpitaux psychiatriques, Carla Cerati, avec Berengo Gardin, dresse de leur situation un tableau brutal. Les vues des patients sont frontales, presque choquantes, ce qui correspondait bien à la finalité du reportage.

Plus de dix ans après, Raymon Depardon photographie à son tour la vie dans les hôpitaux, notamment celui de San Clemente à Venise.
C’est avec son respect et sa délicatesse qu’il montre l’extrême solitude et l’abandon.
Sous son objectif, les corps se recroquevillent avec pudeur.
Clichés poignants qui disent mieux que bien d’autres la souffrance et la désolation.

Italie, doubles visions
Maison européenne de la photographie
Jusqu’au 30 septembre 2007
5-7, rue de Fourcy – Paris 4ème
M° Saint-Paul ou Hôtel de Ville
Du mercredi au dimanche de 11 h à 19 h 45
Entrée 6 € (TR 3 €)

Image : Henri Cartier-Bresson, Scanno, 1951 (Magum Photos)

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Silences. François Sagne (Galerie Frédéric Moisan)

françois sagneFrançois Sagne est un photographe de la pierre et de lumière, qu’il décline en une palette infinie de gris, de noirs et de blancs.

Avec l’exposition Silences, la galerie Frédéric Moisan propose jusqu’au 30 juin une sélection de ses travaux.

Ici, de grands blocs de marbre de Carrare prennent la lumière blanche pour mieux faire ressortir leur coupes nettes, leur matière lisse et douce qui se fait presque texture.

Là, d’immenses pierres sont dans l’ombre, viennent reposer le regard fatigué d’une lumière trop crue. Les grands formats se succèdent ; petit à petit le sombre devient menaçant, l’angoisse pointe.

Après ce face-à-face inédit avec la matière minérale, l’artiste invite à d’autres découvertes.

Nous voici sur les terres d’Egypte et de Jordanie, à Pétra, où la pierre travaillée par l’homme dans de monumentales sculptures offre un spectacle éblouissant.
Le champ est élargi ; la lumière abrupte du soleil au zénith blanchit, épure les paysages, les réduit à leur plus simple expression, celle de leurs reliefs naturels ou crées.
Silences la bien-nommée offre alors un voyage méditatif aux pays des ruines, sous une lumière cristalline qui éblouit et incite, à nouveau, à chercher l’ombre entre les pierres … une quête sans fin dont François Sagne capte des instants majestueux.

Silences. François Sagne.
Galerie Frédéric Moisan
72, rue Mazarine – Paris 6ème
Du mardi au samedi de 11 h à 19 h
Jusqu’au 30 juin 2007

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