Carte blanche à Fabrice Luchini

Luchini afficheAprès un voyage au long cours avec Céline, qui emmenait son public sinon au bout de la nuit, au moins au terme d’une excellente soirée, Fabrice Luchini reprend ses lectures pour une Carte blanche originale.

Ouvrages de Paul Valéry et Roland Barthes en main, porté par sa folle énergie, il ose cette fois des choix plus audacieux.

L’artiste ouvre le spectacle avec un extrait de Tel quel, Le pont de Londres de Valéry et des citations qu’il reprendra plusieurs fois au cours de la soirée :

La plupart des hommes ont une idée si vague de la poésie que ce vague même leur tient lieu de définition de la poésie.

Il n’existe pas d’être capable d’aimer un être tel qu’il est. On demande des modifications.

Puis il poursuit avec un décodage des premières pages des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes. Le ton est celui du professeur idéal, passionné ; la salle s’accroche.

La brèche est ouverte, le comédien lâche ses livres pour se lancer dans son propre texte.
Point de départ : un article dans Le Nouvel Observateur, dans lequel le célèbre essayiste louait le film d’Eric Rohmer Perceval le Gallois.
Le comédien, qui jouait dans le film, se lance dans une évocation de Perceval : le public est d’abord tout aussi perplexe que l’était la salle lors de la première du film.
Mais très vite Luchini-le pitre sort de sa boîte, se met à mimer et à chanter, pour la plus grande joie des spectateurs, rendus carrément hilares.

Il enchaîne avec le récit de sa mémorable rencontre avec Barthes. Façon plus nuancée qu’il n’y paraît de souligner son portrait : à l’immense déférence se mêle une tendre moquerie.

Le programme annonçait aussi du Flaubert : il y en eut deux lignes ; du Molière : il n’y en eut point.
A la place, une fable de La Fontaine avortée puis une autre littéralement abattue…

Fin de spectacle décevante pour une soirée qui avait plutôt bien commencé.
L’extraordinaire énergie semblait épuisée ; le fou de littérature et de scène, fébrile et pressé d’en finir, avait hâte de renvoyer son public – joliment éveillé – à ses livres…

Carte blanche à Fabrice Luchini
Complet au théâtre Paris-Villette
Reprise au Petit Montparnasse à partir du 20 mars

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Cyrano de Bergerac à la Comédie-Française

cyrano Cyrano de Bergerac, la célèbre pièce d’Edmond Rostand méritait bien le bichonnage que lui a réservé le Français.
Denis Podalydès, entouré d’Emmanuel Bourdieu (le réalisateur notamment du film Les amitiés maléfiques) pour la dramaturgie, servi par une troupe exemplaire costumée par Christian Lacroix, évoluant dans les décors d’Eric Ruf, s’est emparé de ce grand classique du patrimoine dramatique français pour réaliser une mise en scène qui fera date.

La truculence, le panache du texte, qui ont valu à la pièce, depuis sa création en 1897 un grand succès populaire, donnent toujours son régal au spectateur.
Mais toute l’intelligence de Denis Podalydès est d’avoir pris le parti, avec beaucoup de finesse, de la profondeur onirique de la pièce, avec son lot de chimères, d’espoirs et d’illusions.
A chaque acte, la mise en scène et les décors débordent d’inventivité, de poésie et de beauté.
Peu importe que Roxane soit un peu fade, voire exagérément gnan-gnan, tous les autres comédiens, des rôles principaux aux secondaires, sont plus que convaincants ; les cadets de Gascogne ont la grâce, Michel Vuillermoz, amusant, bouleversant plus encore, nous éblouit de mille facettes.

Durant 3h1/4 , on reste pendu aux lèvres des comédiens, transporté par les sublimes décors, surpris par les idées de mise en scène …
On en sort absolument ravi … et avec l’heureuse envie de revenir au théâtre.

Montée au printemps dernier, la pièce a été reprise cette automne et se jouera jusqu’au 30 avril 2007.

Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand
Mise en scène : Denis Podalydès
Avec Michel Vuillermoz, Eric Ruf, Françoise Gillard …
Comédie-Française, salle Richelieu
Place Colette – Paris 1er
M° Palais-Royal
A 20h30, 14h le week-end
Durée 3h15
Places de 5 à 35 €

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